Méthodes pédagogiques

Qu’est-ce que la méthode Picot ?

La méthode Picot est une méthode pour apprendre la grammaire dont la caractéristique principale est qu’elle se fait au jour le jour, tous les jours. Elle tire son nom de Françoise Picot. Historienne de formation, elle devient institutrice puis conseillère pédagogique, avant de rejoindre les rangs de l’inspection de l’Éducation Nationale dans l’Est de la France. Ses nombreuses publications en pédagogie, mais aussi sur l’histoire de l’enseignement chez de nombreux éditeurs ont participé du succès de sa méthode d’apprentissage. De nombreux enseignants adoptent cette méthode dans différents contextes. Son travail connait une grande publicité grâce à de nombreuses conférences et formations auxquelles elle participe.

La méthode Picot s‘associe souvent à l’apprentissage de la grammaire qui est le volet le plus célèbre de ses travaux. Elle couvre néanmoins d’autres aspects de l’apprentissage de la langue française que sont notamment la structure et le fonctionnement de la langue, à l’écrit comme à l’oral, mais aussi l’acquisition de l’orthographe et des règles de conjugaison. Elle prône un enrichissement continu du vocabulaire tout au long du cycle 1 au cycle 3 par des outils très normés et répétitifs, mais aussi une pédagogie spiralaire.

Une mise en œuvre guidée pas à pas

Le succès de la méthode Picot tient essentiellement dans une méthode « clé en main », dans le sens où tout le travail d’organisation du travail est déjà pensé en fonction des programmes scolaires de l’Éducation Nationale. Elle s’appuie sur des manuels destinés aux enseignants et réédités chaque année. Les ouvrages comprennent plusieurs parties qui permettent de guider l’enseignant dans la mise en œuvre de la méthode, tout en respectant les attendus de l’inspection que connait Françoise Picot.

Les 5 parties des ouvrages

L’ouvrage comprend en général cinq parties. La première partie comporte un guide pédagogique qui vise à déployer l’argumentaire en faveur de cette méthode (praticité, efficacité) en précisant à la fois les objectifs pédagogiques, mais aussi les finalités d’une telle méthode. Elle s’adresse aux enseignants pour leur transmettre l’esprit de cette méthode, et la différencier d’autres méthodes d’enseignement de la langue française.

La seconde partie propose une programmation segmentée en cinq périodes de sept semaines, qui suivent ainsi le rythme du calendrier scolaire national. La troisième partie porte sur le travail hebdomadaire, sous la forme de séquences en précisant à la fois les textes à travailler, ainsi que les activités à mettre en place dans la classe. La quatrième partie aborde les différents points saillants de chaque leçon et procure une panoplie d’exercices d’accompagnement. Tous les exercices sont à géométrie variable de manière à s’adapter aux besoins des élèves. La cinquième partie présente les différentes évaluations à réaliser avec les élèves.

La spécificité de cette méthode et de sa structuration est de s’appuyer sur des séquences hebdomadaires dont le support pédagogique principal est un texte. Les élèves lisent le texte et c’est à partir de celui-ci que sont travaillés la grammaire, la conjugaison, l’orthographe et le vocabulaire. Ils sont extraits de ces textes des phrases et des groupes de mots. L’enjeu est une étude approfondie des mots en contexte, et non seulement des listes de mots ou de phrases répétées. Les élèves en fin de semaine doivent réinvestir les apports du texte de la semaine sous la forme de courtes productions écrites. Selon Françoise Picot, la manipulation de la langue en contexte permet de comprendre son fonctionnement.

La semaine comme rythme pédagogique

La démarche inductive de Françoise Picot repose ainsi sur cinq étapes : la transposition, la collecte, la synthèse, les exercices et la production écrite, qui rythment ainsi une semaine type.

Le premier jour

Le premier jour s’attache aux activités sur le texte. L’ouvrage de Françoise Picot en propose un pour chaque séquence, mais les enseignants peuvent en choisir d’autres pour s’adapter par exemple au thème du projet d’école ou à la saison. Une première lecture de compréhension du texte permet aux élèves de le découvrir et de se l’approprier, notamment en s’interrogeant sur des éléments factuels (nommer les personnages, identifier les lieux, délimiter les moments de l’action…). La lecture grammaticale du texte ensuite repose sur l’identification des paragraphes et de l’idée de chacun d’entre eux, la recherche du narrateur, la distinction entre ce qui relève du récit ou du dialogue, le relevé des indicateurs spatio-temporels, l’explicitation des inférences et substituts, le relevé des mots invariables…

Un premier exercice ensuite tient dans la transposition du texte en changeant de temps ou de pronom selon l’objet de la séquence. Par exemple, si la séquence porte sur les temps du futur et que le texte est au passé, alors les élèves devront changer le temps des verbes et prêter une grande attention à la concordance des temps. Cette activité se déroule d’abord à l’oral puis à l’écrit pour travailler ces deux compétences. Les élèves doivent ensuite collecter des phrases et effectuer un travail de transposition individuel à l’écrit sur le même modèle. Ce premier jour est ainsi décisif, car il repose sur la découverte d’un texte qui sera le fil rouge de la semaine.

Le deuxième jour

Le second jour est dédié aux phrases et à des activités qui leur sont consacrées. Les élèves identifient les phrases, la ponctuation, les interpréter et préciser l’intonation de chacune. L’enseignant demande aux élèves de trouver les groupes de mots comprenant « à » ou « et ». Une activité de manipulation syntaxique suit cette étape en invitant les élèves à transformer les phrases, identifier le sujet et le verbe, la pronominalisation. Ils sont enfin davantage laissés en autonomie.

Le troisième jour

Le troisième jour est pour les groupes nominaux en passant d’abord par l’identification des noms, des déterminants, des adjectifs, puis par leur classement en fonction du nombre et du genre, et enfin par des changements de ces deux dernières catégories. Par exemple, remplacer les pronoms singuliers par des pronoms au pluriel, ou les pronoms masculins par des pronoms féminins. Les élèves doivent à nouveau travailler en autonomie, seuls ou en groupe.

Le quatrième jour

Le dernier et quatrième jour porte sur le vocabulaire et la production écrite. Il démarre par une recherche dans le dictionnaire des mots de vocabulaire. Les apprenants travaillent plusieurs notions en fonction de la programmation (synonymes, antonymes, familles de mots, polysémie). La séance, et donc ainsi la séquence de la semaine se termine par une production écrite qui doit reprendre les différentes compétences travaillées dans la semaine et le thème du texte. Certaines semaines peuvent varier en se terminant par une synthèse ou une évaluation plus conséquente.

En somme, cette méthode transposable sur plusieurs niveaux s’appuie sur l’étude d’un texte qui est le support pédagogique principal chaque semaine (dont la longueur est ajustable en fonction des élèves), d’activités de lecture et de maniement de la langue (compréhension du texte, activités en autonomie individuelles ou collectives), et d’un temps de structuration avec en parallèle des listes de mots à mémoriser, une dictée flash par jour et une dictée bilan par semaine.

Pourquoi la méthode Picot séduit-elle ?

Premier avantage

Le premier avantage majeur de la méthode Picot partagé par les enseignants est la ritualisation des apprentissages. La répétition selon rythme défini par avance pour les élèves participe de rituels quotidiens et de leur mise en activité efficace. Suivre les mêmes règles, le même cheminement, permet de mettre la classe au travail plus rapidement.

L’ensemble de la classe participe au même rituel, même si les activités s’adaptent en termes de longueur selon les niveaux. L’enseignant pose les questions à l’ensemble de la classe, mais chaque fois, il interroge un élève différent. Par exemple : Qu’est-ce qu’on cherche en premier dans le texte ? Comment trouve-t-on les noms communs ? Qui peut me dire quels sont les noms communs dans cette phrase ? La sollicitation d’élèves différents à chaque fois tout en s’adressant à tous permet d’observer un rythme assez intense, de canaliser l’attention des élèves, mais aussi de les aider à structurer leur pensée. La méthode Picot est ainsi un rituel quotidien dans l’étude de la langue.

Deuxième avantage

Le second aspect attractif de cette méthode est la possibilité de mettre en place une pédagogie différenciée, qui est séduisante à la fois dans des classes de niveaux scolaires hétérogènes ou dans des classes multi-niveaux. C’est un avantage qui résonne également au sein des écoles aux pédagogies alternatives où bien souvent les faibles effectifs, mais aussi les choix pédagogiques guident vers des classes multi-niveau. Les activités peuvent être calibrées en fonction des niveaux et des besoins des élèves.

Les temps de travail en classe dynamisent l’ensemble du groupe, tandis que les temps d’activités en autonomie permettent à chacun de se concentrer sur un support adapté (questions, longueur du texte, difficulté de la dictée que l’enseignant peut la remplacer par un texte à trous). La place donnée au travail de groupe permet aussi aux élèves d’être en collaboration dans les exercices pourtant souvent très individuels. Souvent, la méthode Retz vient en complément de la méthode Picot, car elle permet également cette différenciation.

Troisième avantage

Enfin, le dernier aspect, et non des moindres, est la possibilité de mutualisation des ressources utilisées en classe par les équipes enseignantes. La méthode est aussi facile à suivre, car elle repose sur des manuels édités chaque année, et réédités en fonction des programmes et de leurs actualisations. Les repères, les périodes et les séquences sont ainsi communs et très détaillés. Les équipes enseignantes peuvent ainsi travailler ensemble et partager leurs supports pédagogiques, en insérant ceux des uns et des autres au sein des programmations en cours d’année sans forcément les perturber. Les possibilités d’adaptation et de différenciations rendent cette mutualisation encore plus aisée. Elle est d’ailleurs facilitée par les partages numériques. Au-delà de sites institutionnels de partage de ressources, la multiplication des blogs et sites d’enseignants permet le partage de leurs préparations de cours très facilement.

Limites et adaptations

Limites

Les enseignants soulèvent plusieurs limites face à la méthode Picot, qui ne tiennent pas tellement à la méthode en elle-même, mais à son application face à un public très hétérogène. Tous les publics d’élèves n’ont pas les mêmes besoins et s’il est aisé de mettre en place de nouvelles habitudes avec des CP, il est difficile d’imposer de nouvelles règles à des CM2. Il en est de même pour les enseignants qui se voient également contraints à certains moments de s’adapter au rythme de la classe, au projet de l’école, ou encore aux remplacements.

Le bien est l’ennemi du mieux. Si Françoise Picot dès l’introduction de son livre le précise, c’est au travers de différentes expérimentations que les enseignants ont pu constater que le foisonnement d’activités proposées est davantage une ressource dans laquelle il est nécessaire d’opérer des choix qu’une programmation à suivre à la lettre. La quantité d’activités proposée n’est pas réalisable. Les temps d’enseignement sont limités et il est alors essentiel pour les enseignants de les calibrer dans l’emploi du temps des activités des différentes matières de la classe, mais aussi de sélectionner le plus important et le plus pertinent pour leurs élèves.

Adaptations

Enfin, les enseignants témoignent d’une réelle efficacité de la méthode, mais aussi des nombreuses adaptations qu’ils mettent en place pour rendre leurs séquences davantage opératoires. Ces adaptations relèvent à la fois du calibrage des séquences, mais aussi de la sélection de certaines activités ou encore d’une association avec d’autres méthodes d’apprentissage de la langue française telle que la méthode Retz qui est complémentaire et non en opposition de la méthode Picot.

La méthode Picot est ainsi une méthode pédagogique d’enseignement de la langue structurée et complexe. Cela permet aux enseignants de s’appuyer sur un matériau riche, mais ne remplace en rien la construction des séquences de cours et leur adaptation aux différents publics d’élèves.

Un commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page