Science Pédagogie

Remédiation pédagogique : définition et pratiques clés

La remédiation pédagogique n’est pas une béquille.
C’est une manière de dire à l’élève : « Tu as le droit de ne pas avoir compris… et moi, le devoir de t’aider autrement. »

Quand un savoir ne passe pas, il ne suffit pas de le répéter. Il faut changer de chemin.
Chercher avec l’élève ce qui a bloqué, et surtout, comment repartir.
C’est cela, remédier : accompagner sans remplacer, relancer sans renoncer.

La remédiation pédagogique : définition

On utilise souvent le mot « remédiation » sans le penser vraiment.
Il rassure, donne l’impression d’agir. On « met en place une remédiation » comme on distribue une fiche.
Mais la remédiation pédagogique est plus qu’un dispositif : c’est un acte éthique et professionnel fort.

Elle suppose que l’échec ne soit pas une fin, mais un point de bascule : un moment où l’enseignant choisit de ne pas passer à la suite, mais de revenir, autrement.

L’erreur comme point d’entrée

Remédier, ce n’est pas corriger.
Corriger, c’est effacer.
Remédier, c’est comprendre pourquoi l’erreur a eu lieu, et ouvrir une autre voie d’accès au savoir.

Cela suppose une posture :

« Qu’est-ce qui, dans ma manière de faire, a rendu cette notion difficile ? »
« Qu’est-ce que cette erreur me dit de l’élève, de sa logique, de son rapport au savoir ? »

Ce questionnement est exigeant.
Il interroge la pratique du maître autant que le travail de l’élève.
Et c’est là que la remédiation devient pédagogique — et non simplement technique.

Une exigence de justice, pas un dispositif de secours

On croit parfois que la remédiation est une faveur pour les élèves « en difficulté ».
Mais elle est plus que cela : elle est un principe de justice éducative.

Non pas traiter tout le monde pareil.
Mais donner à chacun ce dont il a besoin pour réussir.
Cela ne veut pas dire baisser les attentes.
Cela veut dire multiplier les chemins, sans renoncer aux objectifs.

La remédiation, quand elle est bien pensée, s’adresse à tous : pas seulement à ceux qui échouent, mais à tous ceux qui, à un moment, ont besoin qu’on les attende, qu’on les aide à relier les fils.

Elle n’est pas une rustine. Elle est le signe d’une école qui refuse d’abandonner.

Trois types de remédiation : vers une réponse adaptée aux besoins

Remédier, ce n’est pas faire « plus », c’est faire autrement.
Mais « autrement » comment ? Il ne suffit pas de dire que l’on va accompagner les élèves en difficulté : encore faut-il choisir une forme de remédiation adaptée, cohérente, juste.

La remédiation pédagogique prend des formes variées. On peut en distinguer trois grandes, selon le moment, la posture de l’enseignant, et la nature de la difficulté rencontrée.

1. L’entretien de remédiation : comprendre avant d’agir

C’est peut-être la forme la plus fine, mais aussi la plus exigeante.
Un temps d’échange individuel, où l’enseignant cherche à comprendre le raisonnement de l’élève, à retracer le fil de ses représentations.

L’entretien de remédiation, c’est le refus de la réponse toute faite.
On interroge l’élève : « Comment as-tu pensé ? Pourquoi as-tu choisi cette démarche ? »
Ce n’est pas une correction, c’est une enquête partagée sur le sens.

Exemple : un élève multiplie au lieu d’additionner dans un problème de proportionnalité. Avant de lui « expliquer », l’enseignant l’invite à verbaliser sa stratégie. Il découvre que l’élève croit devoir toujours « faire × » dans ce type d’exercice. C’est cette représentation erronée qu’il faut travailler, pas l’opération en soi.

  • Intérêt : faire émerger les obstacles cognitifs
  • Limite : exige du temps, souvent difficile en classe entière

2. La séance de remédiation : rejouer l’apprentissage autrement

Ici, on recompose une séquence spécifique pour revenir sur un point non acquis. Ce n’est pas une simple reprise : c’est une reconstruction, qui mobilise d’autres supports, d’autres modalités.

On y change souvent de registre : plus d’oral si l’écrit bloque, plus de concret si l’abstrait échoue, plus d’étayage collectif si l’élève est isolé dans son raisonnement.

Exemple : après une séquence sur les fractions mal comprise, l’enseignant propose une séance en petits groupes avec des objets manipulables (bandelettes, pâte à modeler), pour représenter visuellement ce que « ¾ » signifie.

  • Intérêt : transformer la situation d’apprentissage
  • Limite : nécessite une ingénierie pédagogique spécifique

3. La remédiation intégrée : ajuster en temps réel

Ici, la remédiation ne vient pas après, elle est incluse dans la séance elle-même. L’enseignant observe, ajuste, reformule.
On parle aussi de différenciation réactive.

C’est souvent dans les ateliers, le tutorat, les échanges de procédures qu’elle prend forme.
On saisit un blocage au vol, on propose un détour immédiat. Cela suppose une grande attention à ce qui se joue dans l’instant.

Exemple : pendant un exercice, un élève bloque. Plutôt que de lui donner la solution, l’enseignant lui propose de travailler avec un camarade sur un exemple plus simple. Le but : faire émerger la logique par tâtonnement, avec un appui.

  • Intérêt : réactivité, inscription dans le temps de la classe
  • Limite : moins de profondeur dans le traitement de l’erreur

Trois formes, une même exigence : s’ajuster au plus juste

Aucune de ces formes n’est « meilleure » que les autres.
Elles sont des réponses différentes à des besoins différents.
C’est à l’enseignant de choisir la forme la plus juste, en fonction :
– de l’élève,
– de la nature de l’erreur,
– et des conditions possibles (temps, espace, effectifs…).

Remédier, c’est être capable de passer du diagnostic à l’intervention pertinente.
C’est faire de la pédagogie un art de l’ajustement, jamais un automatisme.

Mettre en œuvre la remédiation : étapes, outils, vigilance éthique

(~500 mots – Mots-clés : les étapes de la remédiation pédagogique, plan de remédiation, conseil de remédiation, remédiation pédagogique)

Remédier, ce n’est pas improviser.
C’est un acte structuré, qui demande un diagnostic fin, une stratégie adaptée, et une vigilance constante sur le sens de l’aide apportée.

Car une remédiation mal pensée peut vite glisser vers l’assistanat.
Et un élève trop « aidé » peut finir par se croire incapable d’apprendre seul.
C’est pourquoi la remédiation pédagogique demande à la fois de la méthode, et une posture éthique claire.

Les quatre étapes fondamentales

Mettre en place une remédiation efficace suppose un chemin en quatre temps.
Chaque étape est essentielle : en sauter une, c’est risquer de viser à côté.

étapes de la remédiation pédagogique

🔹 1. Repérer les erreurs significatives

On commence par observer ce qui bloque : erreurs récurrentes, confusions, contresens.
Mais attention : toutes les erreurs ne se valent pas. Il faut cibler celles qui empêchent réellement d’avancer, et écarter les maladresses superficielles.

🔹 2. Décrire et classer les erreurs

L’erreur n’est pas qu’un résultat faux. C’est un indicateur de raisonnement.
Il s’agit donc de la catégoriser : confusion entre concepts ? mauvaise application d’une règle ? mauvaise lecture de la consigne ?
Ce classement permet de choisir la stratégie de remédiation adéquate.

🔹 3. Comprendre l’origine de l’erreur

C’est le cœur du travail.
Une même erreur peut avoir des causes très différentes.
Comprendre si l’élève a mal retenu, mal interprété, ou jamais compris…
C’est là que l’entretien de remédiation prend tout son sens.

🔹 4. Mettre en place une stratégie sur mesure

La dernière étape : construire un plan de remédiation clair, court, ciblé.
Pas question de tout reprendre. Il faut viser juste, proposer une activité qui reconnecte l’élève au savoir, en l’aidant à reconstruire le sens manquant.

On peut mobiliser :
– des séances spécifiques (révision, reformulation, manipulation),
– du tutorat entre pairs,
– un travail sur les prérequis oubliés,
– ou des outils numériques pour rejouer autrement l’apprentissage.

Outils et formats : choisir avec discernement

Le plan de remédiation peut prendre plusieurs formes, mais il doit rester lisible, court, et orienté vers un objectif clair.
Exemple de format simple :

Objectif cibléErreur repéréeHypothèse sur l’origineAction prévueÉvaluation de la remédiation
Comprendre la divisionConfusion sur l’ordre opératoireConfusion entre partage et groupementActivité de manipulation avec jetonsRésolution d’un problème guidé

Un conseil de remédiation peut aussi être utile : quelques minutes entre collègues pour analyser ensemble des copies, croiser des regards, affiner les hypothèses.

Attention éthique : aider sans enfermer

Remédier, ce n’est pas sauver. Ce n’est pas porter l’élève à bout de bras.
C’est lui donner les moyens de se remettre en mouvement, en préservant sa confiance, son autonomie, sa dignité.

Un élève trop « aidé » peut se sentir assigné à l’échec.
Un élève qu’on n’aide jamais peut croire qu’on l’a déjà abandonné.

C’est pourquoi la remédiation doit toujours viser à rendre l’élève plus fort, pas plus dépendant.
Elle n’est pas un accompagnement éternel, mais une reprise transitoire et exigeante.

Accompagner sans assister : posture enseignante et justice éducative

Remédier, ce n’est pas porter l’élève.
C’est marcher à ses côtés le temps qu’il retrouve son chemin.

Il y a, dans l’idée même de remédiation pédagogique, une tension féconde :
– aider, sans enfermer ;
– soutenir, sans surprotéger ;
– faire réussir, sans faire à la place.

C’est dans cette tension que se construit la posture du pédagogue.

La tentation de l’assistance

Lorsqu’un élève accumule les échecs, l’élan d’aider est naturel. On veut l’encourager, lui éviter une souffrance de plus.
Mais à force d’aider trop, on peut parfois retirer à l’élève le droit d’essayer.

Remédier aux difficultés individuelles d’apprentissage, ce n’est pas neutraliser l’effort.
C’est le rendre possible, en ajustant les conditions, les supports, les attentes…
Sans jamais renoncer à demander un engagement réel.

Une posture exigeante

La remédiation n’est ni une faiblesse ni un confort.
C’est une discipline exigeante, qui oblige à :

  • écouter sans plaquer de diagnostic rapide,
  • poser un cadre clair tout en accueillant la fragilité,
  • chercher à comprendre avant d’agir.

Elle engage l’enseignant dans une pédagogie du lien, où il ne s’agit pas de faire réussir « malgré tout », mais de construire avec l’élève un chemin où l’échec devient formateur.

Vers une école de la transformation, pas de la sélection

Si l’on croit que l’école est faite pour trier, alors la remédiation est inutile.
Mais si l’on croit qu’elle est là pour faire apprendre chacun, alors elle est au cœur du métier.

La remédiation cognitive, par exemple, montre que les blocages ne sont pas des tares : ce sont des manières de penser qu’on peut faire évoluer.
Encore faut-il les identifier, les travailler, et croire qu’elles peuvent changer.

C’est cette foi dans l’éducabilité de tous qui donne à la remédiation son sens le plus profond.

La pédagogie différenciée : cadre, pas exception

La pédagogie différenciée, ce n’est pas faire des fiches spéciales pour certains.
C’est organiser la classe pour que tous puissent apprendre, à leur rythme, par des chemins différents.

La remédiation y a toute sa place.
Non comme un correctif, mais comme une forme d’attention renforcée, temporaire, pensée, évaluable.

Elle n’exonère pas de l’effort.
Elle le rend possible.

Conclusion – Remédier, c’est croire que personne n’est condamné à ne pas comprendre

La remédiation pédagogique ne se résume pas à un ensemble de techniques.
C’est un choix professionnel et éthique, qui affirme que tout élève peut apprendre… à condition qu’on accepte, parfois, de recommencer autrement.

Elle ne vise pas à protéger, mais à libérer.
Elle ne cherche pas à lisser les parcours, mais à honorer la singularité de chacun, sans baisser la garde des exigences.

Dans une école qui doute parfois de sa mission, remédier, c’est résister.
Résister à l’abandon, au fatalisme, à la tentation du tri.
C’est penser que l’on peut toujours faire lien — entre un élève et un savoir, entre une erreur et un progrès, entre un détour et un avenir.

Des dispositifs similaires sont identifiés dans les rapports de l’UNESCO, qui relient remédiation, inclusion et lutte contre le décrochage scolaire. »
ou en note : (voir UNESCO, 2023)

Foire aux questions – Remédiation pédagogique

Pour prolonger la réflexion, répondre aux doutes concrets, et ouvrir la pratique.

🔸 Qu’est-ce que la remédiation pédagogique ?

C’est l’art de reprendre autrement ce qui n’a pas été compris.
On ne refait pas pour faire plus. On reprend pour faire mieux.
L’élève a droit à une deuxième chance, l’enseignant cherche un autre chemin vers la compréhension.

🔸 Quand fait-on de la remédiation ?

Quand un élève n’a pas compris malgré l’enseignement.
Après une évaluation, une activité, un signal faible.
Remédier, c’est dire : « On ne laisse personne derrière. »

🔸 Quelles sont les trois grandes formes de remédiation ?

  1. L’entretien individuel : on cherche à comprendre l’erreur avec l’élève.
  2. La séance ciblée : on rejoue une notion autrement, avec d’autres supports.
  3. La remédiation intégrée : on ajuste en direct, pendant la séance.

Chaque forme a sa force. À l’enseignant de choisir selon le besoin.

🔸 Est-ce la même chose que du soutien scolaire ?

Non.
Le soutien est souvent général, parfois extérieur à la classe.
La remédiation pédagogique est une réponse pensée et ciblée, intégrée à l’enseignement, qui part d’une difficulté précise.

🔸 Comment savoir si une remédiation est réussie ?

Quand l’élève retrouve le fil de l’apprentissage, progresse, et reprend confiance.
Pas forcément parce qu’il a tout réussi, mais parce qu’il a recompris quelque chose.
On le voit : il ose, il tente, il avance.

🔸 Quels outils peut-on utiliser ?

Tout ce qui aide à voir autrement :

  • des objets à manipuler,
  • des exemples concrets,
  • des pairs qui expliquent,
  • une consigne reformulée,
  • un schéma, une image, un silence aussi parfois.

Ce n’est pas l’outil qui compte. C’est l’intention pédagogique.

🔸 Est-ce qu’on peut tout remédier ?

Non.
Mais on peut toujours essayer de comprendre ce qui bloque.
Et c’est déjà beaucoup.
Car ne pas remédier, c’est accepter l’exclusion silencieuse.

Remédier, c’est refuser d’abandonner.
Pas parce qu’on a une solution à tout,
mais parce qu’on choisit de garder la porte ouverte.

Bibliographie

  • Allal, L. (1991). Vers une pratique de l’évaluation formative : Matériel de formation continue des enseignants. De Boeck-Wesmael.​
  • Altet, M. (2001). Pratiques d’évaluation et communication en classe. In G. Figari & M. Achouche (Eds.), L’activité évaluative réinterrogée : Regards scolaires et socioprofessionnels (pp. 78–83). De Boeck Université.​
  • Franck, N. (2017). Remédiation cognitive (2e éd.). Elsevier Masson.​
  • Gillig, J.-M. (2001). Remédiation, soutien et approfondissement à l’école : Théorie et pratique de la différenciation pédagogique. Hachette Éducation.​
  • Marsenach, J., & Mérand, R. (1987). L’évaluation formative en éducation physique et sportive dans les collèges (Rapport de recherche n° 2). Institut National de Recherche Pédagogique (INRP).​
  • Vygotski, L. S. (1997). Pensée et langage (F. Sève, Trad.). La Dispute. (Œuvre originale publiée en 1934)​

7 commentaires

  1. La resolution de probleme mathematiques a l’ecole primaire, quelles strategies

  2. Bonjour !je trouve très intéressant votre article sur la rèmédiation qui est aujourd’hui central dans les enseignements apprentissages je dois préparer un atelier sur la remediation avec mes collègues et j’aimerais avoir une échange d’idées
    Merci

  3. Bonjour j’ai trouvé ce document très riche. Merci beaucoup car il m’a aidé à trouver des contenu pour l’écriture du module sur les stratégies de remédiation.

  4. Merci pour votre retour positif ! Je suis ravi que le document vous ait été utile pour l’écriture de votre module sur les stratégies de remédiation. Si vous avez d’autres questions ou besoin d’aide supplémentaire, n’hésitez pas à me le faire savoir. Bonne continuation dans votre travail !

  5. bonjour pour les débutants en fle en 3 eme année primaire il faut apprendre oralement par le biais des images ou bien apprendre l’alphabet

  6. Merci beaucoup pour votre article ça m’a beaucoup aidé car j’écris un travail de fin de cycle sur la remédiation,ça vraiment inspiré

  7. Je suis très heureux d’avoir lu cet article très édifiant. Merci bien !

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