Conseil de carrière

Pourquoi les enseignants français sont-ils les moins respectés d’Europe?

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a mené une enquête en 2018 sur 260 000 enseignants et chefs d’établissement dans 48 pays. Elle affirme que les enseignants français sont les moins formés en Europe pour gérer les problèmes de gestion de classe et pour instaurer le respect en classe. En 2018, Talis démontre que les enseignants français ne sont pas seulement isolés, sous-payés mais aussi méprisés par leur institution.

Les enseignants français sont de plus en plus nombreux à signaler des problèmes de discipline. Ils ont un manque de formation continue, comparé à leurs collègues d’autres pays pour bien gérer les comportements perturbateurs des élèves. Par exemple, les professeurs de collège ne se contentent pas d’enseigner leur matière. À chaque heure de classe, ils passent plus de dix minutes en moyenne à demander le silence, confisquer un téléphone portable ou faire ôter une casquette.

En l’espace d’une année scolaire, les collégiens français perdent en moyenne sept jours et demi de classe, à raison de 10 minutes par heure, à respecter les règles de discipline, comparé à leurs camarades des autres pays de l’OCDE.  

Voici les raisons pour lesquelles les enseignants français sont les moins respectés d’Europe :

Les enseignants méprisés par leur institution.

Le système français a marginalisé les enseignants dans leur propre institution. Une enquête menée par l’OCDE montre que les enseignants français sont les moins écoutés du monde. Ils sont conscients de cette réalité choquante. En effet, seuls 22 % des enseignants sont associés au management de l’établissement scolaire, contre 50 % dans l’OCDE et 85 % en Finlande. 

Absence de formation continue à la gestion de la discipline.

Les professeurs français sont très qualifiés car ils sont recrutés sur un concours au niveau du master. Mais le problème, c’est qu’ils sont peu ou mal formés sur la gestion de classe. Cette réalité a été confirmée par Karine Tremblay, la responsable du projet Talis à l’OCDE.

Les enseignants sont moins préparés à faire régner la discipline dans leurs salles de classe. En École supérieure du professorat et de l’éducation, les titulaires sont préparés à la construction d’un cours, mais les contractuels sont livrés à eux-mêmes. Alors, comment développer les compétences de gestion de classe des enseignants ?

Les enseignants chevronnés pourraient aider leurs collègues à surmonter les difficultés de discipline en classe. En effet, le tutorat entre enseignants est un outil puissant pour transmettre les techniques qu’ils utilisent pour obtenir une salle de classe calme et attentive.

Les élèves français, champions de l’indiscipline.

Selon les enquêtes PISA, Les élèves français ne sont excellents ni en mathématiques, ni en sciences ni en compétences de l’écrit. Par contre, ils brillent en ce qui concerne l’indiscipline en classe. Ces enquêtes sont basées sur des questions concrètes pour mesurer le climat de discipline :

  • Y a-t-il du bruit et du désordre dans la classe ?
  • Est-ce que l’enseignant attend longtemps avant que les élèves se calment pour commencer le cours ?

Depuis 2012, la France est le pays où le climat de discipline est le plus dégradé au sein de l’OCDE. Mais il n’existe aucune corrélation entre l’indice du climat de discipline et celui des relations élèves-enseignants au sein des établissements français. Quand l’indiscipline règne, les enseignants passent plus de temps à ré-instaurer le calme en classe qu’enseigner. Bref, les élèves apprennent moins, et le bien-être de leurs enseignants est affecté aussi. Mais pourquoi les élèves français manifestent-ils autant d’indiscipline en classe ?

Ce climat d’indiscipline est le fruit de la culture de certaines familles, qui pensent que l’école se construit sans elles, voire contre elles. En France, les enseignants et les parents communiquent moins que dans d’autres pays. C’est pourquoi il est indispensable d’encourager la communication entre l’école et les familles. De plus, en France, les classes sont de plus en plus hétérogènes que dans les autres pays. Selon Talis, 42 % des professeurs déclarent avoir un tiers des élèves issus de milieux défavorisés, contre 20 % en moyenne dans l’OCDE.

Les débutants sont nommés dans les établissements les plus difficiles.

Les jeunes enseignants commencent souvent à travailler dans des milieux défavorisés et sans formation, ou avec des conseils inadaptés, donnés par des gens qui n’ont jamais enseigné dans une classe difficile. Les débutants sont confrontés à leur premier échec, tandis que leurs collègues les plus expérimentés, prioritaires pour les mutations, ont tendance à fuir.

Image dégradée de l’école et de l’enseignant.

Autrefois, l’enseignant était reconnu comme le détenteur des savoirs. Aujourd’hui, ceux-ci sont partagés, et l’accès très rapide de tous à la connaissance porte atteinte à son statut et à sa reconnaissance sociale. De plus, la plupart des français pensent que l’école ne fonctionnent pas bien. Selon un sondage SNUipp-FSU/CSA, plus de 80 % des jeunes enseignants estiment qu’ils entrent dans un métier dévalorisé dans la société. Seuls 5 % des enseignants français se sentent valorisés (Enquête OCDE). C’est un taux très faible par rapport à la moyenne (31 %) des pays de l’OCDE.

La plupart des enseignants considère que la société ne comprend pas les difficultés du plus beau métier du monde. Ils se sentent incompris par leur entourage. Sans oublier que le professeur français passe environ 38 heures hebdomadaires dans l’enceinte de l’école, et qu’il consacre encore plus de temps à la préparation des cours et à la correction des copies.

Par ailleurs, l’enseignant français se sent souvent très seul. Contrairement aux enseignants de l’OCDE, qui sont appuyés et évalués par des acteurs différents de la communauté. L’enseignant français n’est pas soutenu par des programmes de tutorat durant leurs années d’exercice.

Sources :

  • Denis Meuret, « La mauvaise discipline dans les classes françaises et quelques autres résultats de Pisa 2015 », Les Notes du Conseil scientifique, n° 2, mars 2017.
  • sondage SNUipp-FSU/CSA, réalisé en juillet 2010
  • L’enquête internationale de l’OCDE 2018

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